Pour cette 7ème étape : Welcome in England !!!
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Middle England - Jonathan Coe |
Difficile de savoir ce que va donner le Brexit dans les prochaines années mais voyons le côté positif des choses : au moins il aura inspiré Jonathan Coe pour poursuivre l'histoire des enfants de Longbridge. La série comptait déjà Bienvenue au club et Le cercle fermé, et 14 ans après voici : Le Coeur de l'Angleterre 😃.
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Le coeur de l'Angleterre de Jonathan Coe |
Dans ce roman, on retrouve les personnages des deux premiers romans, ils ont atteint la cinquantaine mais pas tellement changé côté caractère 😏.
Le troisième tome peut très bien être lu indépendamment des deux autres, ceci dit je conseillerai fortement de les lire dans l'ordre : on apprécie mieux l'évolution du pays et des mentalités, des années Thatcher de Bienvenue au club, aux années Cameron du coeur de l'Angleterre en passant par les années Blair du cercle fermé.
Résumé : L'histoire alterne entre les récits de plusieurs personnages.
Celui de Benjamin, déjà au centre des deux premiers romans, il vit dans la campagne anglaise depuis sa rupture avec Cicely et se consacre à l'écriture et à la musique. On retrouve au passage son ancien camarade, Charlie, qui est devenu clown et peine à joindre les deux bouts.
Celui de Sophie, la nièce de Benjamin, qui navigue dans le milieu universitaire et se retrouve confrontée d'un côté à ces fameux anglais du coeur de l'Angleterre et d'un autre à des progressistes pas toujours éclairés.
Celui de Doug, journaliste politique, qui doit gérer une fille que tout énerve et dont les rencontres avec son fameux informateur du gouvernement, Nigel, nous apporte des éléments sur cette fameuse question : A quoi pensait le gouvernement Cameron quand il a promit un référendum sur la sortie de l'Union Européenne ?
Mon avis : J'ai adoré les deux premiers tomes de cette trilogie mais d'autres romans de l'auteur m'ont déçus donc j'avais beaucoup d'attente pour ce troisième tome. Est-ce que Jonathan Coe pourrait nous apporter un éclairage différent sur le Brexit ?
Dès le début du roman, avec un débat entre deux auteurs, un français et un anglais, Jonathan Coe pose le décor. D'un côté de la Manche, il y a les très flegmatiques anglais et de l'autre les français toujours un peu énervés presque prêts à faire la révolution. Le fameux flegme britannique n'est plus ce qu'il était apparemment, c'est à se demander d'où cette légende sur le caractère anglais a bien pu être tirée. Le coeur de l'Angleterre nous montre un pays marqué par la nostalgie, la colère et les divisions.
La nostalgie, c'est un peu la spécialité de Benjamin dans ce récit, il ne cesse de revenir à ses souvenirs. C'est aussi une des spécialités de son père, Colin. Le passage où il parle des usines qui ont disparues à Longbridge m'a beaucoup émue. On sent le désoeuvrement de toute une génération face à la désindustrialiation du pays.
Ce qui nous amène à la colère, car oui, Colin, est nostalgique mais il est aussi et surtout en colère. Des personnages énervés, le récit en regorge. Dès le début nous avons un aperçu des émeutes de 2011, qui ne sont pas sans rappeler d'autres émeutes dans d'autres pays d'Europe, laissent voir une Angleterre en proie aux conflits.
L'ouverture des JO de 2012, grande communion de tout le pays, apparaît comme le chant du cygne. Tout le reste du récit deux Angleterre s'affrontent. Une Angleterre urbaine, multiculturelle et intellectuelle face à une autre plus rurale, quelque peu raciste et assez allergique aux raisonnements complexes.
Pourtant le récit reste nuancé. Les urbains, ou plus exactement Londres, ne sont pas épargnés par la critique : Nigel incarne parfaitement une classe politique déconnectée des réalités. A l'opposé, Benjamin, plutôt Angleterre rurale, peut apparaître très agaçant par son indécision parfois. Cependant, dans ses nuances, il reste ferme dans son refus d'accepter la polarisation de son pays. Avec sa soeur, Lois, ils représentent une Angleterre plus calme et accueillante.
En bref : Le coeur de l'Angleterre est un roman à la hauteur des deux premiers tomes de la série. Un portrait sans concessions et avec beaucoup d'ironie de l'Angleterre actuelle. Du grand Jonathan Coe en somme !